Un aumônier militaire dans le Golfe : le père Richard KALKA

J’avais rencontré le père Richard Kalka, aumônier militaire de l’armée française, alors qu’il accompagnait le 1er Régiment de Spahis pour l’engagement terrestre. J’avais assisté à ce que j’ai appelé dans mon petit journal “la dernière messe”, juste avant l’entrée en Irak et la perspective de combats meurtriers, moment de recueillement unique pour tous ces hommes affrontés à la guerre et à la mort.

J’ai retrouvé sa trace grâce au général Barro, qui commandait à l’époque le 1er Spahis. Au téléphone, il m’a dit qu’il était très occupé car il repartait en Afghanistan, toujours auprès des forces françaises, et qu’il n’était pas certain de pouvoir me rencontrer. Parti moi-même en voyage, nous nous sommes ratés mais il m’a envoyé ce journal personnel sur son “baroud pastoral”. Je me suis interdit de censurer un seul détail, car ce témoignage est d’une authenticité rare et reflète parfaitement tous les aspects de la vie de Daguet dans le désert, des plus élevés aux plus prosaïques, avec un mélange décapant de spiritualité et… d’écriture très spirituelle.

Propos recueillis par Pierre BAYLE pour les 20 ans de Daguet

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1. Départ sur 24 heures.

Le 10 janvier 1991 j’ai rendu visite à Jacques Merle, rapatrié sanitaire du Golfe et hospitalisé au Val de Grâce. Jacques ne m’a alors transmis aucune consigne concernant le Golfe car nous ignorions totalement, lui comme moi, que dix jours plus tard, je devrais le remplacer là-bas.

Le 18 janvier au matin, alors que je me livrais tranquillement à mon footing quotidien avec une section de jeunes au Camp de Souge, j’apprenais qu’à 9H30 Georges Favre m’avait laissé un message téléphonique me demandant de le rappeler. Lorsque j’ai pu enfin le joindre, il m’a annoncé que j’étais pressenti pour le Golfe, mais que mon départ ne pourrait avoir lieu qu’une dizaine de jours plus tard. Toujours méfiant quant aux dates et délais dans le monde militaire et comme nous étions vendredi, je passe donc dans la foulée voir le docteur Castel qui me constitue un livret de santé réduit et me gratifie de différentes injections et vaccinations pour le cas où… La matinée se termine à l’Ecole de Santé Navale par un repas réunissant tous les aumôniers de Bordeaux et organisé ce mois-ci chez André Mangeol. De retour chez moi vers 18H30, un contre-ordre : je trouve sur mon répondeur un second message de Georges m’indiquant tout simplement que je dois me présenter dès le lendemain, samedi, au transit de Vincennes, avec un paquetage complet, en vue d’un départ dimanche matin, le 20 janvier 1991. Toujours dans la foulée, je retourne au Camp de Souge et me présente chez l’adjudant-chef Xavier, officier de permanence du jour, qui, avec le sergent Marie, sous-officier du matériel, me constitue en un temps record un paquetage complet. Je passe une nuit blanche à régler mille et un détails et à préparer mes bagages.

Le lendemain, de très bonne heure, avec tout mon paquetage, je monte dans un TGV à la gare de Bordeaux Saint-Jean. Trois heures plus tard, Georges m’accueille à la gare Montparnasse et me conduit directement au transit de Vincennes, puis m’invite à déjeuner dans un « chinois ».

Une courte visite encore à quelques membres de ma famille et amis. Avec eux je regarde une dernière fois le journal télévisé du soir montrant les images de nos gars descendant aux abris avec leur masque à gaz lors des alertes aux SCUD. Je peux lire l’angoisse sur leurs visages et perçois le silence pesant de l’attente. Demain je serai à leurs côtés…

« Les permissions ont été suspendues ce jour aussi bien pour les officiers que pour les gradés. Toute l’armée est en alerte à cause de la fin du délai accordé par le Conseil de sécurité international, il serait plus juste de dire américain, à l’Irak. Ce qui est demandé à l’Irak, c’est le retrait du Koweït. L’héroïque armée irakienne s’est mise en alerte totale, se préparant et s’attendant à une agression américaine et atlantique sur notre territoire bien-aimé (…) Bienvenu au combat, au combat pour la défense de la patrie et de ses principes. Tout est facile si c’est pour la cause de notre chère patrie » [1].  

 

2. Mise en place dans le dispositif « Daguet ».

A l’aube du dimanche 20 janvier, un DC 8 cargo du COTAM décolle de Roissy. C’est alors que le temps s’arrête quelques instants, après la fébrilité de ces dernières 48 heures, et que je peux enfin prendre pleinement conscience de la réalité de mon départ et de ma mission.

Désormais je suis prêt à tout accepter de la Providence : la souffrance, l’épreuve, l’incertitude… et, pour être vraiment libre et heureux, la mort qui, peut-être, m’attend au bout de ce voyage. Une petite escale à Istres me permet de goûter les derniers rayons de soleil hivernal du midi de la France…

L’aéroport de Riyad est déjà plongé dans la nuit (19h00 heure locale : 17h00 à Paris). L’atterrissage sera techniquement difficile, vu la multitude des avions (français, américains, anglais, saoudiens et autres). Leur nombre est tel qu’on se croirait place de la Concorde aux heures de pointe.

Première personne rencontrée sur la piste même, à la descente de l’avion : Alex, le jeune caporal de la BOMAP, que j’ai côtoyé fin 89 à Bangui. Quelle joie de tomber, dans cet aéroport en guerre, sur quelqu’un de connu et de sympa ! Nous nous embrassons comme de vieux camarades…

Une instruction accélérée NBC m’est prodiguée dans l’urgence par un lieutenant GFCA qui, pour clore la séance, m’invite à prendre un café dans son estanco. A peine a-t-il formulé son invitation que la sirène d’alerte au SCUD déchire l’air chaud et humide des hangars de l’aéroport. Nous descendons à la hâte dans un abri au sous-sol. Un adjudant, mécano avion, serre très fort mon bras gauche. Il a peur. Au cours de cette nuit du 20 au 21 janvier 1991, nous avons vécu quatre alertes successives, dont deux dites « noires ». Une mise dans l’ambiance immédiate, rapide et sans transition !

Mais la « mise en place » elle-même aura un plus de piquant et demandera aux aumôniers du théâtre une souplesse de mouvement et une adaptation ad hoc à tout moment. A mon départ de Paris, Georges m’avait expliqué que je serais sans doute chargé des antennes médicales et de l’hôpital militaire de campagne. Dès mon arrivée à Riyad, le chef d’escale, un capitaine de l’armée de l’air, m’indique la Cité du Roi Khaled (CRK) comme destination du lendemain, destination à partir de laquelle je devrais monter encore vers le Nord, je ne sais pas trop bien où, sûrement tout près de la frontière, là où il fait « chaud »…

Jusqu’alors, les huit passagers du cargo de Paris, dont Jean-Michel et Charles, deux aumôniers protestants, nous avions eu un parcours commun. Nous devions donc tous les trois prendre l’avion ce lundi 21 au matin pour la CRK. A 7h30, contrordre : le Transall nous conduit à Rafah. A l’atterrissage, le médecin-général, présent avec nous dans l’avion, est chaleureusement accueilli par ses subordonnés et repart rapidement avec eux pour une destination inconnue. Pour nous, pas de tapis rouge, pas de banderoles, pas d’ovations ni d’Alléluia. Nous restons là sur place tous les trois. Aucune surprise de ma part, mais je crois percevoir dans le regard étonné de mes collègues protestants l’éclat d’une franche déception mêlée d’un zeste d’inquiétude. Une heure plus tard, une P4 vient nous chercher pour nous conduire vers la future antenne chirurgicale n° 4 qui, à ce moment précis, ressemble davantage à un petit troupeau de dromadaires paumé dans le désert : quelques véhicules fraîchement arrivés, dispersés à une dizaine de kilomètres de l’aéroport, devant s’installer Dieu sait où, quand et pour combien de temps, et avec quel matériel.

A la vue de tout cela, mes deux collègues craquent et se prennent à mijoter ensemble un plan dont le caractère opérationnel est indiscutable : « faut surtout pas rester là ». L’un d’eux décide de retourner à Riyad où, tout compte fait, l’immense hall de l’aéroport offre un peu plus de confort (tentes, lits, sanitaires) et une restauration digne de l’armée de l’air, distribuée trois fois par jour. L’autre se souvient soudainement qu’il n’y a pas d’aumônier protestant à Al Asa. Leur décision est prise : demain ils reprennent l’avion pour Riyad.

J’apprends qu’Olive se trouve dans les environs de Rafah, à 6 ou 7 kilomètres de la ville, précisément à l’hôpital militaire de campagne que je cherche. A cette heure-là, bien sûr, aucune liaison routière n’est prévue. Soudain, j’aperçois un adjudant-chef qui semble s’agiter autour de son véhicule. Va-t-il partir ? Et dans quelle direction ? Je m’approche et lui pose tout simplement cette question délicate : « Pourriez-vous, mon adjudant-chef, me conduire jusqu’à l’hôpital ? » Premier miracle des sables, la réponse est « oui ».

Arrivé enfin à destination, je retrouve mon ami Olive bien intégré, comme il sait le faire, à une équipe de cuistots qui s’affairent ici et là pour nourrir tous les affamés (médecins, infirmiers, pilotes de VAB [2] sanitaires), afin de leur permettre de remplir au mieux leur mission. Je revois encore cette image d’Olive coupant religieusement le pain, avec toute la sérénité qu’on lui connaît. C’est ainsi que j’ai le grand bonheur d’être invité à m’asseoir tranquillement à une table de fortune où je suis royalement servi par Olive et ses camarades. Mon premier déjeuner dans le Golfe.

Ainsi réalisé-je très vite que ma place dans le dispositif Daguet [3] ne sera donc pas ici, à l’hôpital de campagne, où Olive a déjà remarquablement fait « son trou » comme aumônier. Il me laisse néanmoins le choix entre ce poste-ci et celui vacant de Jacques Merle auprès de la 6e DLB. Nous tenons quand même à soumettre notre projet à l’autorité militaire, en l’occurrence le général Mouscardès. Dans ce but, nous partons en « stop » militaire à la recherche du CO [4] (centre opérationnel). Ce faisant, tout à fait par hasard naturellement, nous rencontrons Michel Dupuy à la base divisionnaire. Une rencontre de dix minutes, au cours de laquelle nous programmons un « plan de bataille », un dispositif « Daguet » pour les aumôniers. J’ai ainsi l’ordre, avec la bénédiction de Michel, de rejoindre l’aile ouest de la division, comprenant le 2e REI, le 1er REC et le 1er Spahis.

Mais comment faire ? La Providence y pourvoit dans la foulée. Il se trouve qu’au même endroit passe un petit détachement du 2e REI (un officier, deux sous-officiers et deux légionnaires) arrivant de France, pour rejoindre son régiment enfoui dans les sables saoudiens. Je reste avec eux sachant que, tôt ou tard, ils seront récupérés par leur régiment. Nous sommes toujours le 21 janvier. La nuit tombe. Nous attendons. Nous ne serons récupérés que dans l’après-midi du 23. Le soir de ce mercredi du 23, je me présente au chef de corps du 2e REI, le colonel Derville. Là, commence mon épopée de trois mois dans les sables.

« Le bombardement aérien ennemi se poursuit d’une façon continue, intensive et à grande échelle depuis hier soir et durant toute la journée d’aujourd’hui. Dieu te vienne en aide, Faras (NDLR=frère de l’officier). Dieu vous vienne en aide, mes parents. Je suis près de vous malgré la grande distance. Je sens l’inquiétude et la peur que vous avez pour nous. Dieu, viens nous en aide ! » (Journal) 

3. Le premier contact avec les unités.

Juste une petite anecdote qui précède l’une de mes premières messes dans le désert, un dimanche matin. Le capitaine de la compagnie qui m’accueille me fait part d’un désir de confession chez plusieurs de ses subordonnés. Nous nous y préparons donc les uns et les autres avant la célébration. Je reçois un premier gars que j’ai d’abord du mal à comprendre car, me dit-il, il ne parle pas très bien le français. Je lui demande en quelle langue il souhaite se confesser. Il me répond : « en polonais ». « Très bien, vas-y, confesse-toi en polonais, dis-je. » La confession se déroule normalement. Le sacrement de pénitence est administré en bonne et due forme. J’attends le second. Quelle n’est pas ma surprise ! Non seulement il présente les mêmes difficultés mais, qui plus est, le même accent. « En quelle langue veux-tu te confesser ? – En polonais, me répond-il. Très bien, vas-y, confesse-toi en polonais. » Et je lui donne le sacrement de pénitence. Quand arrive le troisième, je n’ose plus poser la question. Je crois rêver lorsqu’à son tour il me parle en polonais. En plein désert saoudien, je commence à me sentir vraiment « at home »… La confession a lieu comme précédemment et je lui donne l’absolution en … latin. Aussi invraisemblable que cela paraisse, le quatrième aussi est Polonais ! Quelques jours plus tard, un légionnaire d’origine anglaise m’accoste : « Mon père, est-il vrai que vous parlez toutes les langues ? »

« Les raids américains et atlantiques ont recommencé et d’une façon intensive. Oh, mon Dieu, le miséricordieux, protège-nous ! Ils ont bombardé le Fort. C’est la région logistique des forces de la Brigade : 2ème Régiment, 843ème Brigade. C’est la raison pour laquelle on les a déplacés ailleurs, à un endroit plus sûr.

« Les actions se sont déroulées d’une façon habituelle jusqu’à la deuxième alerte qui eut lieu à 17h30. Notre compagnie, la deuxième compagnie, a reçu l’ordre de se déplacer et de protéger le PC mobile de la 45ème Division. Nous nous sommes déplacés vers le nouvel endroit. A notre arrivée, nous avons été affectés au 68ème Bataillon de chars. La 3ème compagnie du Bataillon avait pour mission de protéger le PC mobile. Les sections ainsi que les groupes ont été répartis parmi les escadrons de la compagnie. Il faisait froid et très sombre. Ma section, la deuxième, était avec le 2ème escadron aux ordres du lieutenant Saadoun Wara. La nuit fut très pénible car le lieu était nouveau, les visages étaient nouveaux, le froid était intense et la faim encore plus grande. Mais tout cela est facile à supporter si les parents et les proches sont sains et saufs et si Faras se porte bien. Dieu est bon.

Aujourd’hui, la commission de la lutte contre les déserteurs a quitté la place après avoir condamné à mort trois déserteurs du 68ème Bataillon pour avoir quitté le poste défensif, le poste de la virilité et du martyr, où la mort dans l’honneur et l’estime vaut mieux que mourir de cette façon. » (Journal)

4. Modus vivendi au quotidien dans la phase précédant l’offensive terrestre.

Le moral au sein des compagnies semblait très bon. Néanmoins, il était incontestable que les hommes ressentaient le besoin de la présence d’un aumônier parmi eux, ne serait-ce que pour parler à quelqu’un qui était par définition hors hiérarchie. Cela, je le sentais, et le premier contact s’en est trouvé facilité, bien que ce fût ma première rencontre avec la plupart d’entre eux.

Pour être plus présent dans ma pastorale « itinérante », j’ai préféré faire des haltes de deux ou trois jours et vivre au sein d’une section de combat ou d’un peloton de chars, si bien que je n’ai jamais eu ni le temps ni la possibilité de poser mon paquetage. L’accueil était toujours très sympathique, dans la simplicité bien entendu, avec la légendaire générosité de la légion et le panache de la cavalerie.

Rapidement nous sommes entrés dans le carême par la célébration des Cendres le 13 février, un carême qui devait durer comme tous les autres quarante jours et quarante nuits, avec une seule différence, mais elle était de taille : nous n’avions pas besoin de nous créer un cadre artificiel permettant de mieux vivre notre ascèse évangélique ; le cadre nous était offert dans le paquetage de la mission elle-même. L’une des lectures nous rappelait d’ailleurs bien à propos que dans le désert Jésus « vivait quarante jours parmi les bêtes sauvages, tenté par Satan, et les Anges le servaient… »

Constipé pendant trois jours, sûrement à cause de toutes les émotions de l’arrivée dans le dispositif des sables, j’ai mis un certain temps à découvrir les toilettes « Daguet ». « C’est à cent mettre d’ici, mon père. – Dans quelle direction ? demandai-je naïvement. Je ne vois pas. – Je vous le répète, mon père, insistait avec un sourire malicieux le grand Henri Biaudelle du 2e REI, à cent mètres dans n’importe quelle direction. Mais vous n’oubliez pas de prendre une pelle avec vous… »

En revanche, j’ai mis beaucoup plus de temps à découvrir la douche. Il a fallu que neuf jours après mon arrivée, je me trouve tout à fait par hasard au TC2 du 2e REI à côté du capitaine Durand (qui avait une mauvaise vue mais un excellent odorat), pour que l’on me propose enfin de prendre une douche ! C’était une véritable douche de campagne faisant partie d’une chaîne militaire de décontamination NBC. La bâche qui couvrait cette belle invention hygiénique avait été balayée la nuit précédente par la tempête. Comme il faisait très froid et que le vent glacial refroidissait l’eau dès sa sortie du pommeau, personne ce jour-là n’osait s’aventurer en tenue d’Adam. J’ai donc pris le risque de compromettre ma spiritualité de prêtre moderne en recourant aux joies moyenâgeuses de flagellation et de mortification, un avant-goût de la « joie parfaite » selon saint François d’Assise.

La rusticité de la vie, l’imminence d’une offensive terrestre, la menace permanente d’une éventuelle attaque, chimique ou autre, tout cela faisait que les gens, du 2° classe au colonel, vivaient une cohésion presque impensable en temps de paix dans une garnison en France. J’avais même l’impression parfois qu’à la place des liens hiérarchiques se nouaient des liens d’amitié qui, contrairement aux préjugés, n’entravaient en rien ni la discipline, ni l’efficacité opérationnelle des troupes. J’ai appris une fois de plus que l’amour n’est que trop conciliable avec l’ordre et la discipline.

« Je me suis levé tôt ce matin pour voir ce que les groupes de la section ont réalisé comme tranchées. Le temps est triste et désolant. Tout le monde est occupé à creuser et à vaquer à ses occupations.

« Les avions passent au-dessus de nous à très haute altitude, porteurs de destruction à nos parents, à nos unités et à nos infrastructures. Oh, si seulement je possédais quelque chose pour descendre ces avions qui ressemblent à des corbeaux !

« Nous avons pris le petit déjeuner au PC de la 3ème compagnie de chars. L’endroit était petit ainsi que l’abri, mais il nous rassemblait et nous remercions Dieu de cela, car c’était l’endroit de repos et l’endroit où se trouvaient les vivres et l’eau.

« Le soir est arrivé à nouveau et je pense à mes parents. Mon Dieu, tu es le plus miséricordieux… » (Journal)

5. Désobéissance ou offensive terrestre à bord d’un VAB.

Le 17 février, le général Janvier convoque tous les aumôniers du théâtre pour une réunion au Centre Opérationnel Daguet. Notre ami Jacques Merle est déjà de retour parmi nous. La présence de Michel Dupuy me permet de me sentir chez moi, comme à l’accoutumée, dans nos réunions mensuelles métropolitaines. Olive Tagliazucchi est retenu par une urgence à l’hôpital. Michel Dehan n’est pas là non plus. En revanche, nous avons la joie d’accueillir l’un de nos collègues protestants, le pasteur Auceps. Alain Roffidal vadrouille quelque part dans l’aile Est de la division et les deux jeunes pasteurs sont aux abris.

Le général Janvier esquisse un dispositif spécial « offensive terrestre » au cas, dit-il où elle aurait lieu. Ses ordres pour les aumôniers sont plus que clairs : nous devrons, dès le début de l’offensive, quitter les unités de tête et rejoindre les antennes chirurgicales et postes de secours à l’arrière. Cela me surprend et je demande timidement s’il est vraiment impossible que nous restions parmi nos gars, lesquels ne comprendraient pas que nous les abandonnions juste avant l’offensive. Le général, avec son humour habituel me répond : « Mon père, ce sera comme je l’ai dit et pas autrement ».

Après la réunion, je retourne au 1° Spahis et rends compte au chef de corps, le colonel Michel Barro. Celui-ci me sourit et me dit : « Ne vous inquiétez pas, je vous garde avec nous. » En fin de matinée, je célèbre une messe, peut-être une dernière pour certains d’entre nous. Il y a beaucoup de monde. Tout le monde prie en pensant sûrement à ceux qui sont restés en France : femme, enfants, parents, amis. Je parle de la vie, du Christ le Vivant qui nous la donne. Je parle de l’amour que nous découvrons ou redécouvrons dans des situations comme celle-ci. Beaucoup communient avec joie. Quelques-uns ont un visage crispé.

La journée de dimanche 24 février commence très tôt le matin. Nous rangeons soigneusement notre paquetage, chargeons les véhicules et nous mettons en place dans une colonne. Les premiers démarrent vers 15h00. A minuit trente, le VAB à bord duquel se trouvent les docteurs Decam et Boyer, l’infirmier major Bourgueil et moi-même, traverse la frontière irakienne…

« Les raids ont recommencé à grande échelle. J’entends toute la nuit le bruit de ces avions qui portent la mort aux Irakiens. Allah Akbar, Allah Akbar !

« Mon Dieu, protège mes parents et mes frères et Faras de tout mal. Mon Dieu, où sont-ils en ce moment ? Que font-ils ? Que mangent-ils ? Les nouvelles sont mauvaises. Nous n’avons aucune bonne nouvelle qui fasse plaisir. Il n’y a que des destructions, et encore des destructions. Mais Dieu est bon et la fin est pour bientôt si Dieu le veut…

Comme il est pénible de recevoir la mort des mains de quelqu’un que tu ne connais pas. La mort vient du ciel, à tout instant, des avions et d’une personne que tu ne connais pas, et que tu ne vois pas. Il te tue et s’en va libre. » (Journal)

6. Mon frère d’armes.

Le mercredi 27 février, nous sommes à la veille du cessez-le-feu, mais nous ne le savons pas encore. Tout le monde est déjà en Irak. Le 26 nous avons eu deux morts (deux paras commandos du 1° RPIMa) et vingt cinq blessés à As Salman. Malgré ce coup dur pour l’ensemble de nos troupes, tout le monde assume sa mission jusqu’au bout et l’optimisme est presque de rigueur. Nous avançons toujours, kilomètre par kilomètre, vers le Nord. Personne ne sait encore quelle sera l’issue de cette entreprise bien étrange.

A 20h00, mon VAB reçoit l’ordre de se rendre sur la route « Texas ». Soudain, c’est à la hauteur des positions françaises les plus avancées, dont les limites sont marquées par quelques patrouilles du 3e RPIMa, que le drame a lieu.

Un 4×4 US, à bord duquel se trouvent un commandant et un sous-officier conducteur, tombe dans une embuscade de francs-tireurs irakiens. Le commandant est tué sur le coup. Je l’ignore pour le moment et lui administre l’extrême onction. En portant mon pouce à son front, je m’aperçois que celui-ci s’enfonce désagréablement. Une petite inspection du véhicule permet de constater que le cerveau entier du commandant se trouve sur le siège arrière : une balle de kalachnikov l’a atteint en plein front, son casque kevlar alors sur les genoux… Il avait 38 ans.

La balle destinée au conducteur s’est logée au fond de son duvet, bien plié et rangé à côté du levier de vitesse. Nous les transportons tous les deux, le mort et le vivant, jusqu’au campement du TC 2 du 1° Spahis. Je passe le reste de la nuit avec le survivant miraculé du 4×4 US. Après deux ou trois cafés et une douzaine de Dunhill, l’adjudant Schultz me montre la photo du commandant entouré de sa femme et de sa fille. Elles ne savent pas encore que pour lui la guerre du Golfe est finie. J’essaie d’imaginer cette femme qui aime et qui attend. En cette nuit du 27 au 28 février, peut-être rêvera-t-elle une dernière fois d’un retour tout proche de son mari…

A 8h00 du matin, la RFI nous annonce le cessez-le-feu.

« Mon Dieu, par notre prophète Mahomet, que Dieu le bénisse, par l’imam Ali Bin Abi Talib, que Dieu soit satisfait de lui, éteins le feu de la guerre et fais régner la paix sur la nation de Mahomet ! Donne la victoire aux musulmans ! Oh, Dieu miséricordieux ! » (Journal)

7. Des amis du camp adverse.

Ils sont cinq, assis par terre, encerclés par les soldats du 1° Spahis, transis de froid et de faim. Ils se serrent les uns contre les autres, en attendant la suite des événements. Bien que les Famas de leurs gardiens soient pointés sur leur front, on ne lit pas l’angoisse dans leurs yeux. Ils sont confiants, ils savent déjà que la chance leur sourit et que le pire est désormais derrière eux. Pour eux cette guerre ubuesque est terminée. La plupart sont des appelés du contingent… depuis dix ans, depuis la guerre contre l’Iran.

Je m’approche de l’un d’eux avec un Spahis et nous leur servons café chaud et cigarettes. Je comprends sans difficulté leur « choukrane », soutenu par un sourire amical. L’un d’entre eux lève le bras et pointe son index vers le galon de mon treillis (que je n’ai jamais enlevé d’ailleurs, contrairement aux consignes, ubuesques elles aussi, de l’époque), où une croix jaune est plus que visible. Il me fait comprendre que lui aussi croit en Jésus-Christ. A ce moment arrive Pierre Bayle, journaliste, ancien du 1° Spahis, qui parlant parfaitement l’arabe, m’aide à échanger avec Youssef.

Quelques semaines plus tard, les cadres et soldats du 1° RHC partagent leurs modestes vivres (rations de combat, boîtes de conserves et friandises des fameux colis « soldat du Golfe ») avec les habitants de As Salman qui, peu à peu, reviennent dans leur ville, désertée la veille de l’offensive terrestre. Baignant dans une foule d’Irakiens pleine d’enfants, fous de joie de pouvoir ce jour-là manger à leur faim, j’entrevois un invisible fil, peut-être pas forcément d’amitié, mais sûrement de confiance et de sympathie, entre eux et les soldats français.

Jusqu’au 23 février, nous étions censés appartenir à deux camps adverses…

8. Les adieux au 1er Spahis.

Avec le départ du 1er Spahis, se termine la première phase de mon baroud pastoral dans le Golfe. Tous les éléments de l’aile Ouest de la division Daguet, présents sur le théâtre depuis septembre 1990, quittent l’Irak en direction de l’Arabie Saoudite, pour embarquer progressivement à Yambu. Ils sont heureux. Les médias français parleront plus tard d’un retour « glorieux » des troupes françaises.

Le départ de la légion et du 1er Spahis me perturbe quelque peu. Les plus anciens soldats du Golfe étaient déjà devenus ma famille. Presque orphelin, j’apprends aussi le départ de Michel Dupuy pour le Koweït. Que faire ?

C’est alors que je commence à comprendre que sur le terrain, en de pareilles circonstances, loin de toute autorité ecclésiastique, il faut prendre tout seul les décisions qui s’imposent. Le capitaine Boutroy, commandant la 4e Batterie du 11e RAMa, détaché pour l’offensive terrestre au profit du 1er Spahis, quitte également celui-ci pour rejoindre son régiment d’origine. Je saute sur l’occasion. 

9. Les fêtes pascales sous une voûte d’artillerie.

Le 11e RAMa, régiment de pointe d’artillerie française, jusqu’alors fractionné en tant qu’appui dans les unités de combat, se reconstitue de nouveau en régiment complet. Les gars me prennent en compte, surpris et contents d’avoir un aumônier à temps plein. Le colonel Novack n’en revient pas et m’accueille avec un chaleureux bonjour en polonais.

C’est avec les artilleurs que je célèbre la semaine sainte et les fêtes pascales, tout en commettant quelques infidélités pour célébrer aussi au 4e Dragons, 3e RHC et 6e RCS. Le dimanche des Rameaux, la messe est très belle. Elle a lieu en Irak, à 60 kilomètres de l’Euphrate, dans une petite oasis, à côté d’un point d’eau, sur un tapis d’herbe verte et fraîche. Avec des branches de filaos à la main, volées grâce à la complicité des prévôts français à As Salman, une soixantaine de jeunes soldats chantent : « Hosanna au Fils de David ! »

Mais ce sera un bonheur incomparable de pouvoir fêter Pâques, alors de nouveau sur le sol saoudien, loin du terrain, ô combien miné, de l’Irak. Le 25 mars après-midi, en passant par la frontière irako-saoudienne, j’ai vu les gars exploser de joie. Ce lundi 25 mars restera, dans la mémoire de ceux qui reviendront, une date bénie de Dieu.

Mais elle sera jour de malédiction pour ce petit garçon de 12 ans qui, une demie heure avant notre départ fêté solennellement par une prise d’armes, a sauté sur une cluster-bomb américaine. Assistant de loin à la cérémonie, juste à la hauteur des premiers véhicules du 11e RAMa gardés par l’adjudant-chef Manchon, j’ai vu cet enfant arriver vers moi, porté par sa mère et accompagné de ses deux grands frères. Sa jambe gauche était arrachée à la hauteur du genou, son pied droit presque inexistant et son bras gauche déchiqueté jusqu’à l’épaule. Il baignait littéralement dans son sang mais sans pousser un seul cri. Pétrifié, il avait le visage impassible et regardait ses blessures comme un étranger fait le constat de dégâts qui ne le concernent pas. L’équipe sanitaire du 11e RAMa se montra une fois de plus à la hauteur de sa mission. Les premiers soins d’urgence furent administrés en un temps record et le garçon transporté à l’hôpital américain de As Salman. Lui aussi était censé appartenir, jusqu’au 23 février 1991, au camp adverse…

La veillée pascale revêt un caractère insolite. Disposés en cercle, dressés vers le ciel, les canons 155 mm forment une voûte suspendue entre le ciel et le désert. Un grand feu éclairant au milieu du cercle. Les visages à la fois graves et rayonnants des artilleurs. Personne ne le dit mais tout le monde le sait : la Résurrection, c’est la victoire de la vie sur la mort, c’est la fin de la guerre : « Qu’éclate dans le ciel la joie des Anges ! Qu’éclate de partout la joie du monde ! »

« Nous sommes arrivés à Kirkouk à 07h30. Autant j’incitais le conducteur à aller vite, autant j’appréhendais cette arrivée. Mon Dieu, j’ai peur qu’il soit arrivé un malheur. J’ai peur de l’inconnu. Je suis arrivé à la maison, la porte était fermée. La rue entière était barrée et vide. Il n’y a personne alentour. Ma crainte qu’il soit arrivé quelque chose à mes parents a augmenté. La base est proche. Les maisons du village ont leurs vitres brisées. Je m’en vais chez mon oncle. C’est ce que j’ai décidé. Je suis arrivé à la maison craignant que quelque chose soit arrivé. Mais, grâce à Dieu, mille fois merci, merci, mon Dieu. Les parents et les proches sont tous en bonne santé, grâce à Dieu. J’ai demandé des nouvelles de Faras en premier. On m’a répondu qu’il allait bien. Les larmes de peur, de tristesse, de joie, de désarroi, de désespoir, se mélangeaient dans les yeux de mes frères, de ma mère et de ma grand-mère. De beaux instants, des instants de bonheur qui font plaisir… Je te rends grâce, oh mon Dieu, et te remercie. »

10. Retour en Irak.

Le 8 avril à midi, un déjeuner habituel, c’est-à-dire une boîte de sardines et une barquette de ration de combat, m’est servi sur un plateau en bronze. Nous sommes six autour d’une table de fortune, dressée dans une tente saoudienne à l’aile Nord-Ouest du campement CO. Tout le monde l’appelle « salle à manger du général ». Effectivement, je suis invité à déjeuner par le général Janvier, en compagnie du colonel Lesquer, avec les lieutenants-colonels Feco et Constant et le capitaine Marconnet.

Le général parle de sa visite la veille à As Salman. J’apprends, un peu surpris, qu’il reste encore un détachement français en Irak, en plein désert, à 10 kilomètres de As Salman, composé du 1er RHC, de la 3e Compagnie du 2e RIMa, de deux sections du 1er RI et d’une compagnie du matériel. En somme, une « paroisse » non négligeable, quantitativement et qualitativement, laissée à l’abandon. En suis-je responsable ? Comme à l’accoutumée, dans une phrase un peu nonchalante, le général me suggère très discrètement de remonter en Irak et de m’occuper de ce dernier module français. A la fin du repas, il me lance subrepticement : « Allez-y donc avec la prochaine liaison hélico. »

A tout hasard, je vais de ce pas voir le responsable du trafic aérien du Centre Opérationnel, pour connaître la date d’une prochaine liaison. La réponse ne se fait pas attendre : « Dans une demi-heure, mon père. » J’ai à peine le temps de ramasser grossièrement mon paquetage et de courir vers le Puma qui est sur le point de décoller. Je retrouve ainsi, une fois de plus, tout le charme de ma condition d’aumônier errant. Aurais-je imaginer, dans cette ambiance de fin de parcours et de départ que je ferais un second séjour en Irak ?

Le soir, après l’accueil par le colonel Hottier, chef de corps du 1er RHC, je dîne à nouveau dans le désert irakien, en compagnie de la 2e Escadrille des Gazelles de combat, commandée par le capitaine De La Motte. Le moral est bon, très bon même, mais le temps commence à peser. Chaque nouvel événement, chaque nouveau visage, ne serait-ce que celui d’un aumônier, sont accueillis avec enthousiasme. Ce n’est donc pas pour moi, ni pour ma fonction de « médecin des âmes », mais c’est un peu pour tuer l’ennui et l’interminable attente que l’on me crée toute une série de missions « tactiques ». Et puisque dans un régiment d’hélicoptères de combat on ne se déplace ni à pied ni en voiture, j’ai la chance inouïe de faire la connaissance, au quotidien, du ciel de la région de As Salman, en compagnie des pilotes du 1er RHC. Même la rencontre avec l’aumônier US Dennis Whitaker, stationnant près de l’aéroport, se fait au cours d’un vol tactique, avec le capitaine Khon comme interprète à bord de ma Gazelle.

 

11. Don Quichotte aura toujours quelques feuilles vertes…

La messe dominicale du 14 avril est ma dernière célébration eucharistique en terre irakienne. « Garde à ton peuple sa joie, Seigneur, toi qui refais ses forces et sa jeunesse. Tu nous as rendu la dignité de fils de Dieu, affermis-nous dans l’espérance de la résurrection » (prière d’ouverture).

Le soir, avec le soleil couchant, tombent les dernières tentes. Nous passons la nuit à même le sol. Le ciel est si étoilé que je passe une bonne partie de la nuit à le contempler et à mémoriser les couleurs désinvoltes du désert nocturne.

A l’aube du 15 avril, le petit déjeuner est succinct. Tout le monde est prêt à partir. Cette fois-ci, il s’agit d’un départ définitif du dernier dispositif français en Irak. J’embarque dans le Puma du capitaine Point. Sur son tableau de bord, une petite mascotte tient, dans ses bras levés, une pancarte où l’on peut lire : « Tu me manques », rappelant une fois de plus que les gars ne sont pas chez eux et que, loin d’ici, une femme, des enfants, des amis, un être aimé anxieusement les attend depuis des mois.

Un arbre, le seul et unique rencontré dans le désert en Irak se dresse sur l’axe « Texas », à 30 kilomètres au nord de la frontière saoudienne, à 600-700 mètres de la route. Cette œuvre originale de la nature, avec une seule branche énorme qui fait un angle de 60° avec le tronc, ressemble de loin à un Don Quichotte, à cette différence près que celui de l’Irak se bat contre les sables, avec la même inefficacité toutefois que le vrai Don Quichotte de la Mancha. J’en parle au capitaine Point. Sans dire un mot, celui-ci change de cap et dirige sa machine vers le Sud-Ouest. Au bout de quelques minutes, nous survolons le prisonnier du désert. Ses quelques feuilles vertes témoignent de la victoire de la vie sur la mort. Même les cluster-bombs n’ont pas eu raison de lui…

12. Rien de nouveau à Riyad.

Jean-Pierre Girard quitte sa « paroisse » le 17 avril. Olive, rencontré par hasard à CRK, me demande d’assurer, avant mon retour en France, le week-end du 20-21 à Riyad. Je débarque à l’escale qui n’a plus rien à voir avec la fourmilière du 20 janvier. Je fais rapidement la tournée des popotes, en m’attardant un peu chez mes vieux camarades, les commandos de l’air, qui me servent un café bien serré. Tout le monde est fatigué. Tout ceux qui sont là ont vécu de tout près, non seulement de très difficiles rapports avec les Saoudiens mais aussi et surtout des alertes permanentes et de fréquentes explosions des SCUD. Je m’incline aujourd’hui devant leur courage et tout particulièrement devant leur endurance psychique et morale.

Le commandant Nicolas, mon vieil ami du 6e RPIMa, est venu me chercher à l’escale pour me conduire jusqu’à l’état-major situé au centre-ville de Riyad. Nous dînons ensemble dans une salle à manger, digne d’un confortable restaurant parisien, aménagée pour l’état-major, le temps de la guerre, par une équipe très souriante, tout à fait opérationnelle à la française. Non seulement je découvre ce soir-là qu’il existe autre chose dans le Golfe que les rations de combat (dont les barquettes favorites « mouton haricot » et « indienne de volaille » mêlées de sable font mal aux intestins quand ceux-ci les assimilent quotidiennement pendant 90 jours), mais en plus je déguste de succulents mets dont les saveurs resteront à jamais gravées dans ma mémoire gustative. J’ai failli commettre un péché d’orgueil en croyant pendant quelques instants que ce dîner avait été commandé exprès pour m’accueillir. « Détrompe-toi, me dit Maurice avec un sourire, c’est comme ça ici depuis le début. »

 

NOTES :

[1] Extrait du journal de Faris Muhammad Salih Altaï, officier irakien de la base de As Salman.

[2] Véhicule de l’avant blindé.

[3] Le nom donné à la division française dans le Golfe.

[4] Centre opérationnel.

Pierre BAYLE
Pierre BAYLEhttps://pierrebayle.typepad.com/pensees_sur_la_planete/
Ancien directeur de la communication du groupe EADS (aujourd'hui AIRBUS), Pierre BAYLE est journaliste professionnel depuis près de vingt ans quand il couvre la guerre du Golfe. Il a également été directeur de la DICoD entre 2013 et 2016.

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